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En France, « les projets EnR existent, les files d’attente sont pleines »

Le Monde de l’Energie ouvre ses colonnes à Hélène Gelas, avocate associée au cabinet Jeantet, spécialisée dans l’installation d’énergies renouvelables, pour obtenir son éclairage sur l’objectif d’EnR de la France pour fin 2023, qui ne devrait pas être atteint.

Le Monde de l’Énergie —L’Observatoire Observ’ER a récemment indiqué que la France ne devrait pas atteindre ses objectifs de puissance installée à fin 2023 dans l’éolien terrestre et le photovoltaïque. Dans quelle mesure et dans quelle ampleur ?

Ce rapport est important à plus d’un titre. Il intervient pratiquement à la fin de la première période de la PPE, fixée à fin 2023, mais également au cours d’une crise énergétique sans précédent. Cela peut être un moment de bascule et où des choix structurants doivent être faits pour l’avenir et la souveraineté énergétique de la France, que ce soit sur le nouveau nucléaire ou encore pour assurer la fin des énergies fossiles.

Le rapport met en évidence un retard et un retard accumulé sur les dernières années, du développement des énergies renouvelables. Il ne s’agit pas d’une surprise. Il en ressort qu’à l’exception des filières hydroélectrique, filière historique, de biomasse solide et de méthanisation, les objectifs à fin 2023 ne seront pas atteints. On peut également souligner que les objectifs fixés pour la biomasse et la méthanisation n’étaient pas des plus ambitieux et que, comparativement à la contribution que ces filières peuvent apporter à la transition énergétique, pour peu qu’on leur en donne les moyens, on pourrait considérer leur déploiement comme également retardé.

Pour l’éolien terrestre, l’éolien en  et le solaire, les objectifs ne sont largement pas atteints. Pour l’éolien terrestre, on est loin des 2GW de puissance supplémentaire par an nécessaires, tandis que la filière solaire n’arrive pas à rattraper le retard accumulé. Quant à l’éolien en mer, les bénéfices des importantes évolutions intervenues dans le régime applicable à leur développement ne se font pas encore sentir.

Le rapport montre, en contrepoint, que les projets existent, les files d’attente sont pleines. Il ne reste plus qu’à… plus qu’à desserrer les contraintes… plus qu’à faire montre d’une réelle volonté de déployer ces projets et de faire cette transition énergétique… plus qu’à faire un choix résolu et engagé.

Le Monde de l’Énergie —Quelles conséquences juridiques pourraient avoir ce non-respect de la PPE ? Le gouvernement ou l’État pourraient-ils être mis en cause ?

Il n’y a pas de conséquence directe au non-respect des objectifs de la PPE, il ne s’agissait que, hélas, de priorités d’action, de poser des orientations. Néanmoins, on a pu voir se développer ces dernières années des contentieux mettant en cause la responsabilité de l’Etat pour non-respect de certains de ses engagements. C’est ainsi le cas, par exemple, de l’Affaire du siècle mettant en cause l’inaction climatique de l’Etat.

Indirectement donc, le non-respect des objectifs que l’Etat s’est fixés dans la PPE, devant servir les objectifs de la politique énergétique définis à l’article L. 100-1 du code de l’énergie, au titre desquels la sécurité de l’approvisionnement ou encore la préservation de la santé humaine et l’environnement, pourrait conduire à la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat.

Le Monde de l’Énergie —Quels leviers sont mis en œuvre pour rattraper ce retard ? La loi sur l’accélération des EnR, adoptée en ce début d’année, peut-elle y contribuer efficacement ?

Y contribuer, oui, efficacement nous verrons. Il faut, déjà, distinguer entre les différentes énergies renouvelables. Ainsi, les dispositions sur l’éolien offshore sont destinées à permettre une planification à long terme et plus efficace. C’est un vrai atout pour le développement de ces projets et donc l’atteinte des objectifs. S’agissant des projets photovoltaïques, les dispositions sur l’agrivoltaïsme devraient permettre leur développement, mais à l’inverse, on notera un durcissement des règles applicables aux projets en zone agricole ou forestière. Des dispositions utiles sont surtout prévues pour la solarisation des parkings ou encore le développement en loi littoral et loi montagne.

En revanche, on attendra de voir la mise en œuvre, notamment en termes de calendrier, de la planification dite ascendante et de la création des « zones d’accélération », et, pour les projets photovoltaïques, de la création du document-cadre pour les zones agricoles et forestières.

Les leviers sont connus. Il s’agit d’accélérer la délivrance des autorisations relatives aux projets alors que, on le rappelle, sur le papier que ce soit les permis de construire ou les autorisations environnementales, ils peuvent être délivrés en un an. Il s’agit, encore, d’accélérer le traitement des contentieux. Beaucoup a, déjà, été fait, en éolien terrestre ou éolien en mer. Mais la durée de l’instance devant le juge est encore trop longue. Le principal levier, qui va aider à ces deux premiers, reste d’augmenter le nombre de juges et le nombre de membres des services préfectoraux.

Le Monde de l’Énergie —L’adoption de la nouvelle loi LPEC, sans doute cet été, qui devrait déboucher sur une nouvelle PPE (et donc de nouveaux objectifs), peut-elle changer la donne, le gouvernement semblant vouloir moins s’appuyer sur l’éolien terrestre que précédemment ?

Le Gouvernement semble vouloir maintenir les objectifs de puissance de production d’électricité à partir de l’énergie éolienne terrestre. Il a effectivement décalé le délai dans lequel ces objectifs doivent être remplis.

On a certainement manqué l’opportunité que constitue la crise énergétique actuelle pour procéder à une réelle accélération du déploiement des projets. Nous verrons les équilibres qui seront trouvés dans la loi LPEC et la PPE. C’est une nouvelle chance de parvenir à un vrai changement de paradigme et à la substitution des énergies fossiles. Il ne faudra pas la manquer.

Source : Le Monde de l'Energie

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